samedi 31 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 A force de vivre dans mon jardin, je suis au courant de tout ce qui s’y passe. Quand la guêpe maçonne, que le bourdon bourdonne et que les pies jacassent. Quand le crapaud prend le frais sous l’origan. Quand les hérissons arrivent à la nuit et farfouillent, le museau dans les feuilles. Quand le chat course la souris et que l’oiseau persifle. L’humanité me désespère alors je reste cachée dans mon écrin. Entoilée dans un monde enfantin, nichée sous les ronces, mes idéaux en poche. Je me dissous, je m’indiffère, je mets du bleu sur le présent. Je l’embellis, je l’exagère. Mes yeux magnifient les couleurs, mes mains s’agitent et puis composent. Je peins par touche des notes qui vibrent, des images qui jaillissent. Mutines. Indisciplinées. C’est bon d’habiter son jardin. Demain, si Août me le permet, j’irai respirer la sarriette et la menthe et l’anis étoilé.





jeudi 29 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Ce matin, la pluie s’est invitée. L’ondée me rassérène. L’humus respire, le sol est gorgé d’eau. C’est une jolie rincée, une averse en colliers, des perles qui dégringolent et se volatilisent. C’est une saison charnière. Une histoire en suspend. J’écris au fil du vent comme une goutte timide qui suit sa trajectoire. Elle s’attarde dans les cieux, funambule entre deux éclairs blancs. Au fil de la journée, c’est un mois qui s’entête. Juillet souffle, il regimbe et se fâche. C’est un été de fonte, une forge allumée, une épée tranchante au ventre des fourneaux. J’écoute le fracas des enclumes, l’impact du marteau. Enfin, dans la soirée, Juillet s’emporte. La clameur est visible, le ciel est furibond. Au loin, les nuages s’obscurcissent. Le déluge est en route, j’entends les grondements. 



mercredi 28 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 J’aime arpenter les pavés, sentir le sol et laisser musarder mes souliers. Ce matin, c’est une ville qui m’attend. J’aperçois un clocher, je parcours des ruelles. Des rues moyenâgeuses encore habitées par le trot des chevaux, le pas des portefaix, la rumeur de toute chose. Des vies qui se sont succédé. Je m’avise d’un troquet et m’assois en terrasse. Il fait encore frais, les bistrots ouvrent, les cafetiers mettent en route les machines. Je goûte l’odeur du café, le grain fraîchement moulu, l’âpreté du breuvage qui glisse dans les rigoles de ma cervelle engourdie. C’est bon d’être en vacances. Je me laisse dériver. À côté de moi, les pigeons se réveillent. Des touristes attablées rient. À gorge déployée. Ça résonne cristallin, c’est franc. Spontané. Elles viennent d’Amsterdam et s’amusent du spectacle. En bons pigeons français, en gourmets distingués, ils dévorent les viennoiseries qu’elles éparpillent. Dans leur ville, ce sont des bêtes à frites qui se gavent et se goinfrent et s’empiffrent de patate et snobent les croissants. Un court moment, je suis sur une place aux Pays-Bas avec de la bière et des frites et des rires et des gens et la vie comme avant.



lundi 26 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

Je ne me souviens même plus que c’est l’été. Je sais qu’il fait chaud dehors. Je porte des sandales, une robe légère et des yeux tout froissés. Alentour, ça sent bon. Les effluves des restaurants, les grillades, les beignets. Assise en terrasse, j’observe les vacanciers qui mangent des glaces, des enfants désœuvrés qui tuent des mouches et les empilent. Ils exposent les cadavres sur la table. Et je bois du café. C’est pénible une mouche. C’est tenace, impudique. Horripilant. Ils sont drôles ces mômes. Je leur souris mais sans vraiment les regarder. J’ai la tête à l’envers, le cœur sur la chaussée. Mes yeux voient de travers. Ma robe est défraîchie et mes sandales usées. Je suis comme étrangère à tout ce qui m’entoure. Mon regard est ailleurs. À la lisière. Perdu entre deux mondes et pourtant sur la Terre. À la ronde, les baigneurs s’éclaboussent, les randonneurs suent, les paresseux s’alanguissent. Je reprends un café et me dis qu’aujourd’hui, je n’ai pas vu l’été. 




dimanche 25 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Que c’est doux la musique. C’est le calme et la brise. C’est un ample soupir. Une rêverie diffuse dans ma chaise à bascule. Dans les mains ce carnet et à mes pieds mes chats. Ce dimanche est à moi. Une journée suspendue, une ellipse, une incise. Demain sera. Je regarde les notes qui s’envolent et murmurent et valsent avec le vent. Que c’est bon la musique. Elle caresse de ses doigts le couloir de mon cou, le silence qui m’étreint, la noirceur qui m’enserre. Elle apaise mes angoisses, se dilue dans l’espace. Elle s’éloigne et revient. C’est comme un narcotique, un onguent antalgique qui soulage mes morsures et distrait le serpent qui s’abreuve à mon sang. Qui me mord et me nuit. Qui m’absorbe et me vide. De ma chaise à bascule, j’entends le Mississipi, le grondement des roues à aube, le blues dans le delta. J’entends les champs de coton, le cri des cannes à sucre, les effluves de tabac. J’écoute Robert Johnson, Son House et puis en boucle, l’Unplugged d’Éric Clapton. Ce soir, c’est au crossroads que j’irai respirer la fraîcheur, frôler les herbes sèches et reprendre des forces pour affronter demain. 




samedi 24 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Il est matin. J’ai un coup de barre dans mes artères, un code-barres prévu pour demain. Je bois mon café. J’avale une gorgée. Je n’ai aucune raison de m’inquiéter, on a tout calculé pour moi. Un code-barres dans ma musique. Un permis d’exister. Une autoroute pour la pensée. Je me réveille matin. J’ai des fourmis dans mes fusibles, des électrodes branchées à rien. Une autre gorgée. À la fin de ma mise à jour programmée, j’oublierai Brel, Brassens, Ferré. On me dira quoi enseigner. Je serai artiste engagé dans l’espace prévu à cet effet. Je serai troubadour ou poète, musicien, clown drôle, professeur éclairé dans le respect du cadre autorisé. Je serai écrivain, pâtissier, mécanicien, vacancier. Dans le respect des cases obligatoires à cocher. J’ai hâte d’être à demain. Avec mon code-barres dans les mains, je graverai mes rêves dans les registres pré-remplis. Les formulaires pré-établis. Légère, ma plume à la main, je gambaderai. Je serai enfin libre d’ouvrir ma gueule dans l’espace commentaires réservé à mes merveilleux lendemains.



vendredi 23 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Tous les jours, je contemple mes tomates. Ce sont des cerises. Elles surgissent dans les lianes. Ce sont des nez de clown, des breloques qui pendouillent, des coquettes à bijoux. À côté, les rondes citrouilles, les petites aubergines et les jolis piments. Ce sont des accroche-cœur, des virgules vermillon. Je regarde mes légumes parce que le temps s’étire et s’essouffle. Parce que mes coccinelles sont des bêtes à poison. Parce l’été s’enfuit dans les ronces et s’englue dans la poix. Parce que mes chenilles sont d’ignobles papillons. Parce que l’araignée scrute. Elle fixe la mouche au tombeau et se délecte et s’achemine. Parce que c’est un juillet sans lune. Une éclipse arbitraire qui ne dit pas son nom. Je regarde la mort des lucioles et l’été qui se fige. Mon potager grandit et la lumière décroît.



jeudi 22 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Elle apparaît sans qu’on l’invite Mme Bidochon. C’est une voix aigrelette qui rouspète. Une musique dissonante. Un grelot grinçant. Elle râle pour tout. Elle grogne pour rien. Quand c’est trop chaud, quand c’est trop froid. Quand c’est salé, quand ça ne l’est pas. Un soir, elle s’affaire dans la cuisine. Les invités sont là, devisent et visitent le jardin. Mme Bidochon coupe les oignons, elle les cisèle avec entrain. Sectionne. Hâche bien fin. Dehors, ça papote. Monsieur Bidochon cause, informe, répond aux questions. La commère a toujours une oreille qui traîne, un truc à dire, un conseil à fournir.

-Quels sont ces fruits orange pendus aux branches ?

Des abricots, il y en a plein. 

- DES NÈFLES ! 

La remarque est vomie, éructée, aboyée. C’est une voix de concierge. Aigre. Stridente. Un rot inarticulé. Dehors, c’est le silence. L’assemblée respire à peine. Elle est sous le choc. Médusée. Les nèfles sont pourris. C’est la saison des abricots. Cette mégère c’est moi. Comme ça. De temps en temps, quand ça me prend. Je dis non à tout. Je bougonne au beau temps. Je sectionne les élans et m’applique à couper les aiguilles de l’horloge qui annonce le printemps.




mardi 20 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien

 Mon carnet se remplit. Jour après jour. Il se noircit. De mots joyeux, d’autres plus gris. Je lui confie mes matins bleus, je lui dédie mes jours de pluie. Comme une semeuse de graines, j’arrose le terreau sur lequel je consigne mes anecdotes, où j’esquisse mon désarroi, où je poudroie mon quotidien. C’est mon carnet, c’est ma musique. Ici je suis chez moi. Ce sont mes mots et c’est ma voix. Je n’appartiens à personne. Je suis un flot, un volcan, un torrent qui se déploie dans les vallées, qui serpente entre les mines, les geôles, les barbelés. Je ne fais de mal à personne. C’est ma partition, mon lutrin. J’ignore combien de temps encore les mots visiteront ma maison. J’ignore mon demain. J’ignore dans quelle prison. Mais ici je suis libre et je crie quand je veux, et je vole si je peux, et je dis merde à Ceux.



Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Aujourd’hui, je ne fais rien. Mais rien de rien. Je glande, je bulle, je m’en tamponne. De tout, de rien, du temps qu’il fait. Du temps qui vient. Du temps qui passe, des petits riens. Du grand bazar qui va bon train. Je débranche les fils, j’enlève les piles. J’ai des épines dans mes godasses. Tiens. Je mets des pantoufles à la place. Des vieux patins qui traînent savates. Aujourd’hui, je ne fous rien. Même plus envie de ronger mon frein, de mélanger la mélasse qui s’est nichée dans le trou noir de mon jardin. C’est un vertige. Un puits sans fond. J’ai une enclume dans ma maison. Je fais une pause. On verra bien. Aujourd’hui, je laisse pisser la suie, glisser la crasse, je fais du ski sur mes angoisses. Je prends un tire-fesses, un télésiège ou un monte-charge et laisse les courts-circuits faire du vélo dans mes synapses. Demain sera et je n’y peux rien.



lundi 19 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Ces jours-ci, de mystérieux cailloux apparaissent dans tous les coins de la maison. Ils sont minuscules. Ce sont des pierres qui vivent groupées. Elles se retrouvent comme par magie disséminées sur le carrelage et les tapis. Je cherche alors un Petit Poucet. Des orphelins égarés. Un lutin fronde en main. Rien. J’entre alors dans des considérations ésotériques. Je parle aux dieux, chantonne de vieux cantiques. C’est sûr, notre logis est fréquenté, des génies l’habitent sans payer de loyer. Des farfadets jouent aux dés, des elfes jaillissent des livres et oublient leurs runes sur les parquets. Ce matin, tandis que mes pensées galopent, que je cogite et m’asticote, j’entends un feulement. Bianca tient dans sa gueule un gecko aux doigts palmés, les crampons arrimés à un de ces fameux galets, bien décidé à entonner son chant du cygne dans un sursaut de dignité.





samedi 17 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Il y a des jours où la tristesse occupe tout mon espace. C’est une Cendrillon pathétique et échevelée. Elle s’obstine à retrouver sa pantoufle. Elle cherche sous les lits, les fauteuils, les canapés. Elle va du sol jusqu’au grenier. C’est une Cendrillon va nus-pieds. Elle gare sa citrouille au beau milieu du potager. Son vieux tacot tout déglingué. Elle s’accapare mes rubans, mes robes, mes atours. C’est une princesse déchue, une amante éconduite qui traîne ses guêtres sur le pavé. Elle squatte la maison mes savates dans les mains, s’insinue dans les murs, se cache dans les recoins. J’ai beau lui dire que son carrosse est à la casse, que ce n’est pas dans mon cœur qu’elle retrouvera sa godasse, elle se drape dans mes vêtements et se campe sur le seuil. C’est une enquiquineuse. Une vieille copine envahissante qui débarque sans sa valise et vient crécher dans les fissures de mon printemps.




jeudi 15 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Quand ça va et même quand ça ne va pas, je parle à mes chats. En réunion sur la terrasse, en symposium sur le balcon, en conciliabule dans la maison, je rassemble mon escadron. Bidouille a les oreilles actives, Janis joue la compassion. Bianca se tâte, Bianca se méfie. Blanche feint l’abandon et Bobby dodeline. L’écoute est totale, le discours unilatéral. Elles sont toujours d’accord. Elles savent que j’ai raison. Pendant que je déblatère, déclame ou vocifère, elles se frisent les moustaches et consentent à me plaire. Elles savent où est le mou. Alors que je m’égare dans la rhétorique, elles calculent, prévoient, planifient. Elles rêvent déjà au doux fumet de la boîte de thon. Elle est comme ça mon escouade féline. Attentive. Majestueuse et sincère dans son affable magnanimité.




mercredi 14 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 La Terre est ténébreuse. Juillet entre en hiver, le ciel me fait des bleus.  Dehors, le monde chancelle, grisonne et s’enlaidit. Le soleil tremble, grelotte, s’épuise. C’est un juillet de marbre, un mois aux reflets gris. Une Saison en enfer, c’est Rimbaud sous la pluie. La rivière qui m’abreuve peu à peu s’ankylose. C’est une triste chanson fredonnée aujourd’hui. Celle des matins maussades, des journées rocailleuses, des aurores tourmentées. Mon soleil rapetisse, se cache et se consume. C’est une bougie frileuse. Elle vacille et frissonne mais résiste à la nuit. Me revient La Fontaine. Ce n’est pas tout de geindre. Il faut sortir d’ici.




lundi 12 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 Mon univers est un jardin où les fourmis font des affaires. Les escargots chaussent des patins, les araignées portent des altères. Je les côtoie de bon matin, un pas devant, un pas derrière. Quand je caracole mon chagrin, que j’ai du plomb dans les artères, je fais la ronde avec entrain, un pas en avant, un pas en arrière. J’ai une chanson pour le pinson, un trémolo pour l’abricot. Une ritournelle pour le crapaud, des farandoles plein mon chapeau. Mon quotidien c’est un plumier. Une comptine à pas cadencés. Trois pas de côté, dix pas à l’envers. Sept pas à cloche-pied, cinq pas de travers.




samedi 10 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien.

 C’est un soir de juillet. Au village, le bal bat son plein. Dans mon jardin, l’écho des années 80. Me reviennent les slows collés, les baisers chapardés, la guinguette sur le lac. Je me souviens les copains, les cigarettes, les premières taffes qui font tousser. Comme un poisson rouge asphyxié, j’ai le regard du condamné. J’ai quinze, dix-sept ans. Dans les yeux, l’étincelle. Le rendez-vous galant. Les vinyles, la buvette, les petits verres à cinq francs. Dans la bouche, le goût des tequilas frappées. C’est fort, c’est amer, c’est salé. J’ai les synapses en terrain accidenté, les tympans sur une fréquence étoilée. Je me souviens les bals musette, les lumignons. Les amours transitoires, la promesse de l’été. Dans le cœur, l’arôme sépia de ma jeunesse comme la saveur d’un bon café.




vendredi 9 juillet 2021

Au fil des jours, Carnets du quotidien .

Elle m’apaise, Blanche. Quand elle grelote un miaulement. Quand elle pose sa patte dans mon cou. Quand ses yeux en amandes me fixent d’un air si doux. 

C’est une aristocrate, Blanche. Elle dédaigne le vulgaire. C’est dans la volupté qu’elle traite ses affaires. Installée dans la causeuse, elle tient salon, ordonne, légifère. Le commun l’indiffère. Elle fréquente les astres, les étoiles, l’univers. 

C’est Madame Récamier, c’est un tableau, c’est un mystère. Sa robe est veloutée, caressante. Céleste. Son regard éthéré transperce la matière. Elle voit dans l’au-delà, traverse les frontières. Elle touche l’invisible, converse avec la Terre. 

Elle m’écoute, Blanche. Quand je suis dans mon bain, aux fourneaux, au jardin. Attentive et soucieuse quand j’apprends à me taire.




jeudi 8 juillet 2021

Au fil des jours…

Il est des journées indociles où mes pensées s’obstinent à réfléchir à ma place. Alors j’écris. Je rentre dans une bulle, crayonne des sensations. Les mots sont des pinceaux capricieux. Il s’invitent, s’imposent, s’échappent. Patiente et opiniâtre, je rature à foison. Disloque les morphèmes, fait chanter les phonèmes, conjugue à perdre haleine. Le style est un oiseau qui s’envole à tir-d’aile, qui revient à fleur d’eau. C’est un océan qui s’en va, une idée qui s’en vient. Un poisson qui frétille au bout d’un hameçon, une vision qui fourmille, apparaît, tourne en rond. Quand mes pensées sont blêmes, que le monde est malade, que ça ne tourne plus rond, je confie mes « je t’aime » à mes tendres crayons. 




mercredi 7 juillet 2021

Au fil des jours…

 S’il y a une chose dont je suis sûre, c’est que je vieillis. Le reste n’est que conjectures. Un matin, je me suis apparue. Le temps avait visité les courbes de mon visage, voyagé sans encombres sur l’échancrure de mon corsage. Pirate aux tempes argentées, il avait dérobé mes perles pour s’en faire un blason, installé ses pénates au cœur de ma maison. Je partage avec lui le rythme des saisons, l’ennui du quotidien, les étendues nouvelles. Il a pris ses quartiers, respire à notre unisson. J’ai beau maquiller les contours, lisser les lézardes, l’écorce de mon plastron frissonne chaque jour davantage. J’ai les mains vieilles et je suis devenue sage.



lundi 5 juillet 2021

Au fil des jours…

 


Il y a des jours où je cours partout. C’est plus fort que moi, je ramasse tout. Là un citron, là une chandelle. Une tasse de thé, une hirondelle. Je fais valser les bibelots, tinter la vaisselle. S’envoler les rideaux,  trembler les coccinelles. Là une abeille, là un oiseau, là mes mitaines, là un manteau. Je fais s’éparpiller les feuilles qui tapissent le jardin, s’en aller les araignées qui tissent bon train, s’enfuir le coq qui s’égosille au petit matin.

Il y a des jours où j’enrage tout. La pluie, le vent, les grandes marées. 

Je suis la tempête impromptue, l’orage suspendu qui gonfle dans la cohue d’un ciel embouteillé.

dimanche 4 juillet 2021

Au fil des jours…

 La pluie tombe, au loin l’orage fulmine. Les nouvelles sont mauvaises, je reste dans mon lit. C’est bien beau les comptines, les guirlandes dans les mots. C’est bien beau bader aux grenouilles, compter les escargots. Se gausser des épines, endimancher le gris mais les nouvelles sont mauvaises et je n’ai pas de parapluie. Le lierre sort ses ventouses et rampe sur les murets. Sur terre le tonnerre gronde, les cafards s’amoncellent. Ils clapotent dans leurs bottes, complotent et s’éparpillent. C’est un drôle de dimanche. Une journée immobile. Un matin d’indolence. Je cherche mon parapluie. L’inondation menace, je monte sur mon lit.Le monde est sous amphétamines, les tigres sont de sortie. La blessure est mortelle, la plaie suinte et gangrène. Les nouvelles sont mauvaises, toujours pas de parapluie. C’est un paratonnerre que je place sous mon lit. 




samedi 3 juillet 2021

Au fil des jours…

 Juillet a entrouvert la porte. Il a toqué sans bruit. Caressé mon visage. Accaparé mon lit. Dans un soupir suave, entonné une romance alanguie, une moite mélopée, l’entêtante musique des crépuscules enivrants et des matins fleuris.

Dans la lumière du soir, au moment où les couleurs s’adoucissent et teintent le monde d’une étincelle mordorée, Juillet s’est annoncé. Souffle ardent, chaude clarté, amant inattendu. Visite inespérée.

Amoureux fervent, Conquistador éphémère, il a saisi le berceau de mon corps et m’a possédée sans un cri.