mardi 29 novembre 2016

Maman, sept ans après




   Onze heures

     Tous les matins toilette faite crème appliquée avec soin sur ta peau d'albâtre…

Belle... Inexorablement malgré la mort fine que l'on t'injecte et les petits points rouges que tu aperçois sur le mur aseptisé de ta chambre de la Dame aux Camélias.
Chauve... Noir de jais tes cheveux de belle italienne... 
Touffe clairsemée... Vite, vite, le petit foulard marron clair qui ne te quittera pas.

Tu n'as jamais été si belle statue agonisante, compagne des gisants de pierre.


Yeux noirs, profonds, insondables... Ailleurs.
Où ? 
De l'autre côté.
Beauté évanescente, toute en transparence...

Les sens... Toucher pastel... Tes grands yeux noirs profonds ouverts sur un monde qui n'existe déjà plus pour moi.
L'hôpital mouroir... Pas de pleurs devant la mourante, ça ne se fait pas.

Larmes qui dégoulinent, juste avant de rentrer dans le sanctuaire de maman. Faire bonne figure. Ils ont dit de ne pas pleurer devant la Dame aux Camélias.

Air perdu, perchée sur une branche inconnue… Regard au loin du bord… Elle n'est plus là maman silencieuse inconnue. Yeux enfants...  Mémoire nuit des temps...

C'est à Elle.

De loin maman oiseau sans son bonnet. Elles ont oublié de lui remettre sa dignité ! Cheveux noirs épars... Sourcils, cils, brûlés…
Crème nourrissante  nourrisson appliquée sur cette peau diaphane séchée par le produit mortel. 

Transparente maman oisillon…

Picore picore oiseau, prends la becquée. Le goût du sensible n'existe plus… Nourriture vie… Plaire à celle qui insuffle la vie qui s’enfuit qui s’accroche et pourtant qui veut vivre...

Encore.
Barreaux... Le lit devenu cage... L'envol est terminé rêve de liberté.

Un bleu sur la tendre peau, souvenir du dernier effort pour sauter les barreaux de la cage prison. Démonter les barreaux acier lit médicalisé. 

Prison cage abhorrée honnie.

Transfusion... Quelques couleurs ravivent le teint évanescent... Le temps est compté les forces abandonnent l'être…
Les êtres autour de toi maman...

Ils ont dit qu'il ne fallait pas pleurer... La vie se consume autour de la cage oiseau prison.

L'oisillon pépie de moins en moins. Souffle bruyant... Mort fine sommeil insondable…
L'âme s'envole peu à peu
De la cage oiseau liberté maman...

Maman... Maman... 
Les pépiements souffle des canaris ont jailli... Une fois dernière...
Porte ouverte tu es partie... Qui osait t'enfermer dans la chambre cage lit prison oiseau obscure ?

Libre mon italienne... Ma maman tempête... Mon orage... Ma fulgurante reine, vernis rose sur draps blancs...

Partie libre poupée transparente éclat lumineux.

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